Le programme des travaux de restauration

Nouveau baptême pour la basilique Notre-Dame

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Le patrimoine subit un rajeunissement grâce au programme des travaux de restauration de la Basilique. 

16 octobre 2024, par Jean-François Nadeau


L’un des monuments les plus visités de Montréal bénéficie d’une cure de jouvence : à terme, plus de 50 millions de dollars seront consacrés à la restauration de la basilique Notre-Dame. « Nous en sommes à la phase trois d’un projet qui en comptera huit », explique l’architecte Daniel Durand, tout en haut de la tour Est de la basilique. Dite de la Tempérance, cette tour a longtemps dominé Montréal avec ses 69 mètres d’élévation. Elle comporte un carillon de 10 cloches.

 

Le maçon Marc-André Aubertin travaille à ce vaste chantier depuis trois ans. « Je vais être là encore tout l’hiver. Au début, quand j’ai commencé ce métier, j’étais comme vous : j’avais l’impression que tout tournait tellement c’est haut. Puis, je me suis habitué. » Son père a été maçon sur des chantiers semblables pendant 43 ans. Il l’est à son tour depuis 18 ans. « J’ai lâché l’école ; mon père m’a embarqué là-dedans. Au début, j’avais de la misère. Mais c’est sûr que, maintenant, ça rend fier de travailler sur un monument pareil. Je peux dire que j’ai reconstruit les deux tours de Notre-Dame ! Ce n’est pas rien ! »

Marc-André Aubertin ne parle pas de reconstruction pour rien. La pierre des deux tours dessinées par l’architecte John Ostell après l’écrasement des révolutionnaires de 1837-1838 n’était pas de très bonne qualité. « Enfin, ce n’est pas tellement la qualité de la pierre qui faisait défaut que le fait qu’elle a été installée, dans bien des cas, dans le mauvais sens, dans le sens contraire à la sédimentation du calcaire », explique l’architecte Daniel Durand. Ce qui en a accéléré l’effritement, la délamination, les fractures, la désagrégation irréversible.

 

Cette église très carrée à l’austérité toute gothique, dessinée par l’architecte James O’Donnell et inspirée par l’architecture américaine, avait été décriée à l’époque par ceux qui étaient restés attachés aux formes tout en rondeur des églises romanes dont avait hérité la Nouvelle-France. La basilique Notre-Dame a d’ailleurs remplacé une église de ce type dont le pourtour original est désormais marqué, pour mieux en conserver la mémoire, sur le parvis de l’église. L’ethnologue Marius Barbeau était de ceux qui chantaient pouilles à l’égard de la nouvelle église Notre-Dame, pour lui une construction sacrilège par rapport à l’esprit architectural français.

« Au Québec, avec notre climat », des pierres calcaires de ce genre durent environ un siècle, expose Pascal Létourneau, associé principal au cabinet DFS Architecture, une entreprise fondée en 1904. Or, jamais depuis la construction de la basilique, une réfection d’une telle ampleur n’avait été opérée.

 

« Il y a eu des échafaudages sommaires dans les années 1990. C’étaient des travaux en surface. Maintenant, nous enlevons tout le parement, jusqu’au coeur. On voit d’ailleurs que c’est du solide », indique-t-il tandis que les échafauds oscillent. « Vous êtes chanceux de monter ici par une aussi belle journée ! Quand il vente, c’est autre chose ! »

 

Sur des photographies du XIXe siècle de la basilique Notre-Dame, la nature poreuse des pierres des tours est déjà bien visible. Dès la construction du bâtiment, les maîtres d’oeuvre n’étaient pas sans savoir que la pierre utilisée pour les tours s’avérait de moins bonne qualité que celles utilisées pour le corps principal. Cette pierre grise, pour l’essentiel, provenait de la carrière dite « des tanneries ». Là où se trouve aujourd’hui, à Montréal, le parc Sir-Wilfrid-Laurier.

 

Chaque pierre pèse plus de 125 kilos. Il faut les numéroter, les déplacer avec des treuils, les redescendre et les remplacer, une à une, par une pierre taillée à l’identique en atelier à partir d’un matériau brut qui vient de la région de Québec. Plus de 2000 pierres doivent être complètement remplacées sur les hauteurs des tours de la basilique Notre-Dame. Plusieurs corps de métier sont impliqués.

Mathieu Verreault, le directeur des opérations de la basilique Notre-Dame, insiste pour dire que les coûts de rénovation sont assumés quasi entièrement en interne. « Nous pensions que le coût des rénovations serait de l’ordre de 30 à 35 millions de dollars. Nous sommes plutôt désormais dans un horizon de 50 millions. » Les travaux doivent aussi s’attarder à l’intérieur du bâtiment. Là, des hordes de touristes font la file et prennent des photos.

 

À l’intérieur de l’église, c’est autour des fonts baptismaux tout juste restaurés — dans les lumières nimbées des vitraux des années 1930 signés par Guillaume-Ernest Pellus et sous une voûte peinte par Ozias Leduc, le maître de Paul-Émile Borduas — qu’avaient donné rendez-vous au Devoir, sous une colombe dorée fixée au plafond, les maîtres d’oeuvre de cette vaste entreprise de restauration.

 

Du coin de l’oeil, impossible de ne pas s’émouvoir de l’orgie de bois durs sculptés et ciselés, portant fleurons et déclinaisons sacrées dans une suite infinie d’enjolivures. Tout dans cette église, des bénitiers jusqu’aux dalles colorées, rappelle le poids qu’a eu la religion dans cette civilisation chrétienne dont la basilique Notre-Dame constitue l’un des témoins majeurs en Amérique du Nord.

 

Même s’il s’agit pourtant d’un des pôles du tourisme à Montréal, l’État québécois a peu investi jusqu’ici dans ce projet de réfection qui doit se poursuivre jusqu’à l’orée de la décennie 2030. Le Conseil du patrimoine religieux du Québec a consacré, pour la première phase des travaux, la somme d’un million de dollars. « C’est à peu près 5 % de son budget total annuel », indique Mathieu Verreault, bien conscient que les besoins sont très grands partout au Québec.

 

« Nous avons besoin d’aide », laisse tomber celui qui est également directeur des affaires touristiques de la Fabrique de la paroisse Notre-Dame. « Par le site Internet de la Fabrique, il sera possible de faire des dons. » Ces sommes ne serviront qu’à la réfection de ce bâtiment patrimonial selon les règles de l’art, assure-t-il

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